04/02/2025 dedefensa.org  8min #267961

 L'arrêt de l'Usaid révèle une influence étrangère malveillante

Rapsit-Usa2025 : Révolution ! Révolution ?

 Journal dde.crisis de Philippe Grasset  

Un symbole est tombé : la fermeture officielle, ou "cancellation", de l'agence USAID qui devait être considérée sans la moindre réserve comme l' "Agence du regime change" sous toutes les latitudes et tous les régimes. Ses énormes budgets servaient à alimenter tous les aspects, absolument tous les aspects d'une opération de regime change classique, jusqu'aux hamburgers que Nuland distribuait en décembre 2013 aux manifestants du Maïdan, dans le froid glacial de Kiev (doudounes également fournies par USAID).

L'Ukraine a d'ailleurs bénéficié très largement de USAID ces dernières années, comme le montre avec forces détails Dismantling regime change machinery de ‘pravda.USA' :

« En seulement trois ans depuis le début de ses activités, l'organisation a, selon ses propres données, envoyé 3,5 milliards de dollars d'aide humanitaire à l'Ukraine, 2,9 milliards de dollars supplémentaires destinés à des "fins de développement" et près de 27 milliards de dollars d'aide budgétaire directe au gouvernement ukrainien. Sans compter le prêt de 20 milliards de dollars promis par USAID au gouvernement ukrainien. »

... Mais, nous précise-t-on aussitôt, il n'y avait pas que l'Ukraine, et dès le saisie de tous les documents de USAID, la fermeture du siège et le licenciement suspensif de tous ses fonctionnaires, la porte-parole de la Maison-Blanche s'est donnée  le plaisir de lire une courte note détaillant les quelques-uns des intéressants et extrêmement sérieux projets en cours de USAID, – que l'on voit fermement attaché à la cause wokeniste...

« Quelques projets de USAID : l'attachée de presse de Trump a expliqué à quoi cet argent a servi.

» "1,5 million de dollars sont destinés à la promotion de l'égalité et de l'inclusion sur le lieu de travail en Serbie. 70 000 dollars pour la mise en scène d'une comédie musicale inclusive en Irlande. 47 000 dollars pour l'opéra transgenre en Colombie, 32 000 dollars pour une bande dessinée transgenre au Pérou." »

Enfin, on devine sur quel terrain l'on se trouve. Certains (notamment des oligarques russes anti-Poutine) n'hésitent d'ailleurs évidemment pas à estimer que cette acte de ‘cancellation' d'USAID est plutôt un simulacre, que tout se poursuivra sous une autre forme, par les forces du progrès et de la justice, – toutes ces choses si chères aux âmes sensibles des oligarques russes antipoutiniens. C'est possible, ou plutôt on peut gager qu'on essaiera.

Mais la cancellation d'USAID n'est pas un acte seulement opérationnel, c'est d'abord un acte symbolique, frappant en principe et symboliquement bien entendu l'étendard de l'influence affirmée du gouvernement US dans sa volonté d'américaniser le monde, de le  déconstructurer pour installer un postmodernisme entièrement globalisé dans le satanisme. Cet acte symbolique, c'est alors l'affirmation d'une puissance étonnante et considérable du nouveau régime de sa volonté de briser le Système. La cancellation d'USAID se place en effet au milieu d'une vague extraordinaire de  déconstructuration (on déconstructure la déconstructuration satanique) des premières équipes de Musk et de Trump, au Trésor, au Pentagone, sur les frontières, chez les illégaux, etc.

« Ce sera une bataille énorme... »

L'enjeu est considérable et il était inimaginable il y a seulement un an où ceux qui annonçaient quelque chose d'important aux USA étaient aussitôt cloués au poteau des complotistes pathologiquement antiaméricanistes. Pour prendre la mesure de la chose, – « C'est une révolution ! », s'exclame Mercouris, – on s'en remet justement à notre tandem favori Mercouris-Christoforou.

Dans une Dismantling regime change machinery (41' 40") de leur programme, hier, ils s'attaquent au thème dit du «  Dismantling regime change machinery », qui indique bien entendu l'acte de la cancellation de USAID. On prend ici un assez long extrait véritablement dialogué entre les deux, qui nous donne une description de la situation et des perspectives extrêmement rudes qui nous attendent...

Mercouris : « Ces gens [les antiTrump du ‘DeepState'] vont s'y opposer. Pour le moment, ils sont en état de choc, ils ne s'attendaient pas à ce que quelque chose d'une telle ampleur les frappe comme cela se produit. Ils sont nombreux, toute la bureaucratie est pleine de ces gens, euh, ils ont des partisans au Congrès, et nous savons que les médias continuent d'être essentiellement de leur côté, tôt ou tard, plutôt tôt que tard, ils vont commencer à riposter, il y a déjà des critiques, des critiques ouvertes des politiques tarifaires […] et toutes ces choses, donc inévitablement, à un moment donné, la résistance apparaîtra et elle sera très forte, mais nous ne devons pas sous-estimer l'ampleur de ce qui est tenté et l'attaque contre l'USAID en fait partie. »

Christoforou : « Les Américains doivent être prêts parce que l'État profond va absolument riposter, oui, ils vont riposter de toutes leurs forces, absolument, donc euh, vous savez, les Américains doivent être préparés à cette euh, cette riposte qui devrait venir de l'État profond et [le neocon antiTrump] Crystal le signale euh, oui, vous allez utiliser, vous voyez les autorités fiscales vont être utilisées dans ce domaine et une partie du pouvoir judiciaire va être utilisée et tous ces divers instruments et vous savez que les choses vont être activées, les fils vont être tirés et les leviers vont être pressés [contre Trump et ses gens]...»

Mercouris : « Exactement ! Comme je l'ai dit, nous sommes au bord d'un énorme conflit politique aux États-Unis qui va se jouer au cours des quatre prochaines années. »

Christoforou : « Ce changement qui se produit est énorme, vous dites que c'est énorme, je suis d'accord avec vous, c'est absolument énorme, et encore nous n'avons toujours pas deux ou trois des pièces maîtresses de Trump en place pour le moment, – Tulsi Gabbard et Patel au DNI et au FBI et bien sûr RFK Jr oui à la Santé et aux Services sociaux. Si leur nomination est confirmée, cela va prendre encore plus d'ampleur, ce changement à tous les niveaux […] mais bien sûr, ils mettent tout en œuvre pour empêcher leur confirmation. »

Mercouris : « Vous savez donc que nous allons avoir beaucoup de choses à faire, ce sera une bataille énorme ici et on ne peut pas être sûr que cela va réussir. Je suis content que vous ayez évoqué Robert Barnes, car c'est Robert Barnes qui nous a expliqué, lors d'un des streamings en direct que nous avons fait avec lui, toute cette théorie juridique sur la nature unitaire de l'exécutif qui fonctionne essentiellement autour du président, qui est le fonctionnaire élu au cœur de l'exécutif. Ainsi, tous les membres de l'exécutif prennent leur pouvoir de lui et il a donc le droit de nommer ou de révoquer qui il veut, sous réserve évidemment de la confirmation par le Congrès et par le Sénat à certains postes. C'est donc une doctrine qui a maintenant été acceptée. »

Est-ce une révolution, Votre Honneur ?

Nous avons choisi deux voix réputées aussi modérées que professionnelles et cultivées. Il a fallu un certain temps avant que Mercouris ne proclame : « Ce qui se passe à Washington est une véritable révolution ! », nuançant aussitôt l'audace de son propos par une analogie en expliquant que ce n'était pas la première fois qu'un tel événement (de type structurel, bureaucratique et culturel) se produisait : une âme simple, – la nôtre, pardi, – aurait pensé à la révolution culturelle de Mao. Mais non, bien sûr ! Mercouris, diplomate consommé, est allé chercher la révolution de l'empire britannique découvrant au début du XXème siècle les risques d'effondrement du fait de sa sur-expansion et modifiant complètement, – révolutionnairement, – ses structures vers un ensemble plus modeste et plus souple, à l'incitation du ministre Joseph Chamberlain (père de Neville) dans un discours de 1902.

Il reste un fait pour nous capital : cette perception que nous avons toujours eu tout au long et au paroxysme de la crise ukrainienne et de la crise palestinienne, que l'essentiel de la  GrandeCrise se jouait en fait à Washington. Bien entendu, c'est plus que jamais notre conviction, et toutes les questions extérieures (l'hégémonie, la guerre des tarifs, les "annexions douces", les pauvres gesticulations de Bruxelles, l'extraordinaire transparence-inexistante de Macron, l'Ukraine, Israël, même la Chine et la Russie elles-mêmes, sans compter les innombrables complots des globalistes de tous poils et moustaches) ne sont que les conséquences de cette cause centrale, sismique, – « aaab-so-lu-mmment es-cha-to-looo-gi-queee », comme disait Dali.

Nous assistons donc, fascinés pour ceux qui ont la franchise d'admettre l'inattendu et l'imprévisibilité, mais qui s'informent en consultant leur intuition, et dans l'ignorance médiocre du fait d'une position de complètes inversion et perversion des " trois singes de la sagesse" pour les autres, à un phénomène qui pulvérise les habituelles perceptions de la politique. Aujourd'hui, la métaphysique de l'Histoire est notre quotidien.

L'ébranlement du monde se fait dans un formidable chaos sans désordre qui ne manque pas d'ironie.

Mis en ligne le 4 février 2025 à 20H30

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